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7ème Chronique

Blackwater : privatisation de la guerre d'irak !

Kritix, le Thursday 11 October 2007 - 3552 consultations - Commenter la chronique

Le bourbier irakien n'en finit pas de faire école... Les USA cherchent une issue au conflit irakien en établissant par la force un état de droit aux contours démocratiques, aux rouages institutionnels. Le Congrès US à majorité démocrate s'oppose au président US républicain sur la question stratégique de cette guerre. Depuis de nombreux mois, la présidence US fait valoir le manque de recrues pour servir un Irak en proie à une instabilité chronique de l'ordre public.
       Le sang coule, les autorités irakiennes ne doivent leur salut qu'aux bons hospices des USA: ces zones de hautes sécurité quadrillant Bagdad et parfois le pays. Cette guerre de maintien de l'ordre nécessite des effectifs en constante augmentation, d'où le choix de la présidence de G W Bush de missionner en Irak des milices privées, européennes et US, aux objectifs purement sécuritaires et ne répondant pas des commandements militaires US traditionnels. Un rapport du Congrès US accable la société Blackwater, chantre de ce nouveau modèle de défense anglo-saxon.

Le 16 septembre 2007, des insurgés irakiens visèrent un convoi diplomatique US. Ledit convoi riposta délibérément, mais par l'entregent de la société privée Blackwater qui répondra aux escarmouches avec l'efficacité d'une société de nettoyage au beau milieu de l'une des grandes places de Bagdad, la place Nisoor: 17 morts et 22 blessés irakiens, tous civils. Cette milice répondait de la sécurité de la diplomatie US en Irak: ambassade et convois. Blackwater aurait à son actif 200 incidents armés depuis 2005 perpétrés en Irak, dont 84 % de bavures où ces miliciens ont outrepassé les règles militaires et sommations d'usages imposées à tout militaire. Blackwater a supplée l'armée US et britannique à l'automne 2004 dans le bastion rebelle de Faloudja: ici se pose la question d'une complémentarité des forces ambigüe et en perte de légitimité.
       Depuis 2003 jusqu'en 2006, des lois US imposées à l'Irak assuraient l'immunité à ces compagnies de sécurité: on parle d'extraterritorialité. Or, nous sommes en 2007, Blackwater devra-t-elle répondre devant la justice civile? Dans tous les cas les USA paieront longtemps ces faux-semblants qui portent atteinte à l'image US de superpuissance, incapable d'assurer seule ses stratégies militaires. D'où ce climat de suspicion généralisé intenable tant pour les USA que pour l'Irak.
       C'est l'incident de trop: l'émoi parmi la société civile est palpable, les milices dégradent l'image de l'occupation US et il y a doute sur les intentions pacifiques des USA. Les autorités irakiennes réagirent vivement en exigeant des USA le départ immédiat du sol irakien de ces mercenaires sans foi ni loi.
       Début octobre 2007, le premier ministre Nouri al Maliki exigea réparation de la société Blackwater, en se fondant sur le précédent des attentats de Lockerbie en Ecosse en 1988, et réclama 136 millions de dollars à répartir entre les 17 familles de victimes. Pour dénouer la crise entre Washington et Bagdad, le FBI enquête sur la tuerie. Enquête répondant du récent rapport du Congrès US et de celui du gouvernement irakien.

Ce précédent pose le problème de souveraineté quand le maintien de l'ordre dépend d'intérêts privés donc financiers, non d'autorités publiques quel qu'elles soient. Selon les autorités irakiennes, 180 firmes, essentiellement US et européennes, opéreraient en Irak. Elles y emploieraient entre 25.000 et 48.000 personnes, milices pudiquement dénommées "sociétés de sécurités"; elles coûteraient selon des rumeurs de plus en plus insistantes quelque 5 milliards de dollars depuis 2003 au contribuable US. Blackwater rémunère ses prestations 1100 dollars par jour et par mercenaire sur la base de contrats fédéraux. Les mercenaires perçoivent une solde 6 fois plus importante que celles allouées aux simples conscrits de l'armée US.
       Blackwater assure la protection de l'ambassade US à Bagdad, la protection du commandant David Petraeus des forces US en Irak et jusqu'à aujourd'hui un millier d'agents à sa solde, prêtent main forte aux troupes régulières US. Une nouvelle bavure a eu lieu le 9 octobre 2007 où deux irakiennes ont été tuées toujours sans sommations sur des civils en plein centre de Bagdad dans le quartier de Karrada par une autre société privée de sécurité. Six autres carnages auraient été perpétré par Blackwater. La chef de la diplomatie US Mme Rice, s'est engagée à faire un suivi rapproché des pratiques de Blackwater via des agents fédéraux pour que de tels exactions n'aient plus lieu: les USA font fî de la requête irakienne demandant le retrait de ces milices.
       En réaction, le 10 octobre 2007 le secrétaire général du Comité des oulémas musulmans en Irak, cheikh Hareth al-Dhari, a invité ses coreligionnaires à ne pas porter assistance aux Américains dans leur lutte contre Al-Qaïda. Veut-on réellement lutter contre le terrorisme internationnal?

Aux USA, le Congrès s'engage à combler le vide-juridique concernant la sous-traitance des guerres, par le vote de lois encadrant l'emploi de ce procédé sécuritaire. Dans ce contexte, on assiste à une privatisation assumée de la guerre en dehors de tout contrôle démocratique: le modèle de flexibilité et d'externalisation des moyens de production économique s'étend désormais à la Défense en étant appliqué à l'art de la guerre.


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