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5ème Chronique

Siège d'Alep, dièse de Saladin

Kritix, le Sunday 14 October 2012 - 3165 consultations - Commenter la chronique

Octobre 2012, rouge sang. Classé au patrimoine mondial de l'Humanité par l'Unesco, le souk d'Halab est pilonné par les forces loyalistes de Bachar-el-Assad ; saccage en règle de l'économie syrienne par la minorité alaouite, après celui de Homs où l'on enterra à la hâte sous les « bombes Assad » les victimes civiles dans les jardins publics. Depuis mars 2011, la guerre civile fit 32 000 morts dont 22 000 civils, selon des ONG. Les forces de libération affrontent les armes russes que le principe de non-ingérence chinois permet. Le bloc atlantiste obéit à la Chine et reste inconséquent. Alep comme partout en Syrie comprend de multiples communautés confessionnelles qui font alliance ou s'affrontent. L'unité nationale de la Syrie est mouvante, ce qui explique l'enlisement des conflits et le recours à la répression systématique d'un régime autoritaire maquillé de parlementarisme complaisant.

Citadelle des siècles, rempart d'Al-Malik an-Nâsir Salâh ad-Dîn Yûsuf

Halab, fondée il y a 4 000 ans, ville sous influence babylonienne, grecque, romaine, arabe avec les grands Ali Sayf al-Dawla et Saladin ; puis vinrent les influences mamelouks, ottomanes, britanniques et françaises. Au XIXème siècle, le réformateur Abd al-Rahman al-Kawakibi d'Alep aura une influence décisive sur le panarabisme. Glacis des âges sombres et d'or, permanence cosmopolite, relève défis et contradictions, chassé-croisé des complexités culturelles. Alep n'est pas troyenne ; Alep ne pétrifie pas ses enfants ; Alep tient tête et rassemble toujours les ennemis d'hier : Saladin, pétrifié à Damas, respire à Homs et Alep. Ambiance et convivialité des grandes cités ; dans ses rues pavées, sa gastronomie, son commerce, son artisanat, Alep y déambule et subjugue ceux et celles installés ou de passage. Situé au carrefour de l'Orient et de l'Occident dans le commerce des huiles, épices et soies, cet art de vivre n'appartient qu'aux grandes civilisations héritées. Cette sagesse sait combien ses richesses ne sont à pourfendre.

La France, amie du Moyen-Orient

La France a toujours eu pour les terres syriennes des liens d'amitié préservés. Cette politique tient pour l'essentiel en des termes géostratégiques, mais surtout culturels. La voix élyséenne y porte une résonance toute particulière au-delà des minorités, en ce qu'elle tient compte des subtilités politiques de nations musulmanes transfrontalières. Le général De Gaulle marqua la Syrie tout autant que les présidents François Mitterrand et Jacques Chirac. Le clan Assad, allié historique de la France, a renié ses engagements bilatéraux en ne réformant utilement les institutions politiques syriennes, en exacerbant le « diviser les communautés pour mieux gouverner ».

Alep ne se rendra pas

Citadelle d'Alep.
© kritix.com

Mourir pour Alep est question de survie. La Syrie laïque lui doit tant. Son salut dépend pour l'essentiel du sacrifice des enfants d'Alep. La mécanique mortifère du régime Bachar-el-Assad saigne un pays pour un régime perdu, un parti Baas dévoyé, une laïcité éventrée. Fondé en 1947 à Damas, ce parti socialiste n'est plus qu'une coquille vide. Une souveraineté, jour après jour, disqualifiée par la Terreur. L’État de droit a été déchu par son garant. Le monde libre observe fiévreux les spasmes d'un régime aux abois. Les pontes onusiens ménagent les intérêts atlantistes, les intérêts sino-russes, les intérêts ambigus d'un monde arabo-musulman protéiforme. La France de 2012 est toujours enferrée dans l'Otan et subit les politiques attentistes de Washington. Paris doit user de toutes les mesures de rétorsions à sa disposition en quittant le commandement intégré de l'Otan, pour garantir et porter assistance aux souverainetés populaires de nations amies, ingérence patente exclue. Ce que firent les présidences De Gaulle, Mitterrand et Chirac.

Abandon d'Alep, exutoire, solution.

La Syrie laïque était une nation amie de la France, tant qu'elle respectait l’État de droit. La Terreur n'est pas une politique acceptée en diplomatie occidentale. Le pétrole gouverne l'ONU. La guerre du Moyen-Orient n'est que reportée. C'est un conflit perdant-perdant. Le régime des mollahs scrute Alep : les haines entre obédiences religieuses ne prennent pas.

En Damas, la tentation est grande d'y étendre le fascisme depuis Téhéran aux portes d'Israël. Washington arme Israël. Moscou arme Damas. Les Saoud se bunkérisent par défiance d'un monde musulman imprévisible. Téhéran s'arme. Beijing s'ingère « nullement » en décidant de beaucoup à Washington. Alep, exutoire pour un temps, solution du moment.


      


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