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4ème Chronique

Tchétchénie : Memorial pleure Natalia Estemirova

Kritix, le Thursday 20 August 2009 - 4450 consultations - Commenter la chronique

La politique de terreur de Ramzan Kadyrov s'étend en Tchétchénie ! Il est le seul détenteur de la réalité du pouvoir, dont l'allégeance au Kremlin n'est plus à démontrer...

Drapeau et armoiries de Tchétchénie.
Wikimedia Common ; Montage Kritix.com

Le 7 juillet 2009, un rebelle est tué à Akhtimchou-Barzoï, devant les habitants, dans les montagnes du sud-est de la Tchétchénie ; le 9 juillet, la militante Natalia Estemirova rapporta des témoignages à charge contre les Kadyrovtsy, les seconds couteaux du président tchétchène ; le 11 juillet, Nourdi Noukhajiev, médiateur du gouvernement tchétchène pour les droits de l'homme, mit en garde le chef du bureau Memorial de Grozny, faisant savoir que ce sujet délicat aurait dû rester une question nationale, selon l'entourage de la présidence qui n'aurait pas accepté cette incartade !
       La raison d'État russo-tchétchène s'applique à contourner l'État de droit : une exécution capitale extra-judiciaire, un enlèvement ou rapt ne sont pas conformes à la constitution et aux lois russes et tchétchènes !


Estemirova devait rencontrer F24 le matin de son assassinat
envoyé par france24.
Une équipe de FRANCE 24 avait rendez-vous avec la militante des droits de l'Homme Natalia Estemirova le matin de son assassinat. Les journalistes l'ont attendue en vain: quelques heures plus tard, son corps sans vie était retrouvé en Ingouchie

Assassinat tchétchène : Natalia Estemirova, morte pour les droits de l'Homme ! Journaliste, militante des droits de l'Homme, courageuse, elle portait la mémoire du martyre d'Anna Potikovskaïa (voir la chronique Tchétchénie de Poutine: Anna Politkovskaya assassinée, Zaïnap Gashaeva persévère !), son amie (voir aussi la chronique Zainap Gashaeva, colombe tchétchène). Natalia Estemirova traquait les responsables des massacres en Tchtéchénie. Ces enquêtes à hauts risques alimentaient le fond de l'ONG Memorial pour laquelle elle travaillait sans relâche. Cette ONG compile tous les éléments de preuves à l'encontre des crimes contre l'humanité dont les auteurs sont plus ou moins liés aux intérêts russes. Inlassablement, Natalia Estemirova enquêtait sur les enlèvements, exécutions et assassinats de masse en Tchétchénie. Lauréate de nombreux prix, elle dénonçait la poursuite des exactions en Tchétchénie, officiellement pacifiée.

Natasha Estemirova.
Photo Reuters - Creative Commons - Diffusion & modification autorisées

Natalia Estemirova, 50 ans, ancienne journaliste et collaboratrice de l'ONG Memorial, a été enlevée le 15 juillet dernier en Tchétchénie et retrouvée morte, tuée par deux balles. L'ONG Memorial décida, une semaine plus tard, de suspendre ses activités à son bureau de Grozny, en raison du climat de terreur qui règne dans la capitale tchétchène. Natalia Estemirova fut l'objet des pires menaces du Kremlin et du président tchétchène Kadyrov... Kidnappée au bas de son immeuble dans un quartier populaire en plein centre de Grozny, emmenée en trombe par ses ravisseurs... pour finir, quelques heures plus tard, sur le bas côté d'une autoroute de la république voisine d'Ingouchie (Caucase russe). Natalia Estemirova fut lâchement supprimée d'une balle dans le cœur, d'une balle dans la tempe ! Lors de ses funérailles, on remonta sa dépouille dans un médiocre véhicule jaune, par l'avenue Vladimir Poutine de Grozny, qu'elle répugnait toujours à fréquenter, non sans raisons...

Son amie Anna Politkovskaïa avait elle aussi été assassinée au pied de son domicile moscovite en 2006 ! Dans cette même veine tragique, d'autres défenseurs des droits de l'Homme sont à inscrire au tableau des martyrs. Ainsi, en 2004, Nikolaï Guirenko fut tué à Saint Petersbourg pour avoir mis en lumière les exactions de l'extrême droite russe. En 2008, Magomed Evloïev fut tué à Nazran, pour avoir eu le tort d'être indépendant par son site internet ingushetiya.ru ! En 2009, l'avocat Stanislav Markelov, défenseur des victimes tchétchènes et de Anastasia Babourova, journaliste à Novaïa Gazeta (quatrième assassinat de journaliste dans ce journal d'opposition russe depuis l'an 2000), assassinée en 2009 après avoir enquêtée sur des groupes néo-nazis !

Il est a signalé que l'actionnariat de ce journal indépendant, Novaïa Gazeta, est hautement politique : le grand réformateur et père de la Perestroïka, dernier chef de l'URSS, Mikhaïl Gorbatchev (qui évita le bain de sang par sa Perestroïka) et le milliardaire ancien député de la Douma, Alexandre Lebedev, possèdent 49% du journal...


Manifestation en mémoire de Natalia Estemirova
envoyé par nocommenttv.
http://www.euronews.net Manifestation en mémoire de Natalia Estemirova à Grozny et Moscou

Sept experts indépendants de l'ONU ont proposé, le 21 juillet 2009, leur contribution à Moscou pour enquêter sur les meurtres de défenseurs des droits de l'homme, d'avocats et de journalistes dans le Nord-Caucase. Le Monde allait une fois de plus assister aux arcanes russes de la raison d'État... Le 22 juillet 2009, Andreï Koulaguine, un militant russe des droits de l'homme, a été retrouvé mort deux mois après sa disparition en Carélie (nord-ouest de la Russie). Andreï Koulaguine enquêtait sur les conditions carcérales russes et avait disparu le 14 mai 2009. Son corps a été trouvé le 10 juillet 2009 dans une carrière de sable près de Petrozavodsk, capitale de la Carélie, a précisé l'ONG Spravedlivost. Ces drames suscitèrent une vague d'indignation en Occident rappelant l'assassinat, en octobre 2006, de la journaliste Anna Politkovskaïa qui dénonçait aussi les atteintes aux droits de l'Homme en Tchétchénie et avait travaillé avec Natalia Estemirova.

Le 22 juillet 2009, les Nobels de la paix Shirin Ebadi (voir aussi la chronique Poitiers reçut Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix 2003), Desmond Tutu, Mairead Maguire, Jody Williams ou Rigoberta Menchu Tum, ainsi que la veuve du dissident soviétique Andreï Sakharov et l'ancien président tchèque Vaclav Havel ; tous exhortèrent le Kremlin à poursuivre les assassins de la militante des droits de l'homme (tout comme le président Poutine prétendit pourchasser, avec le tact de sa formation aux services secrets russes, les terroristes « jusque dans les chiottes »). De son côté, la FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme) demanda instamment aux USA et à l'UE d'exiger de la Russie une réponse appropriée à ce crime contre les droits de l'Homme.

Drapeau et armoiries de Russie.
Wikimedia Common - Montage Kritix.com

Des militants éminents des droits de l'Homme russes comme Lioudmila Alexeeva et Lev Ponomarev, écrivirent au président Dimitri Medvedev afin que le président tchétchène soit suspendu pendant la durée de l'enquête sur l'assassinat de Natalia Estemirova. En effet, l'activité de Natalia Estemirova a mené, par le passé, à la découverte de cas de violations patentes des droits de l'Homme en Tchétchénie : elle était dangereuse pour les autorités locales.

Les enquêtes de Natalia Estemirova sur des enlèvements et des exécutions sommaires commises par des agents russes et tchétchènes, irritèrent souvent les autorités tchétchènes... Sous la pression de la communauté internationale, surtout allemande par l'entremise de la vertueuse chancelière Angela Merkel, le président russe Medvedev lui rendit un hommage inédit, inextinguible, pour « la vérité » qu'elle disait ; compassion inenvisageable par Vladimir Poutine.

Les USA et l'UE firent part au Kremlin de leur consternation. Le président Dimitri Medvedev répondit qu'une enquête déterminerait les coupables... Il faut savoir que les commanditaires de crimes d'états ne sont jamais révélés en Russie ; on ne sanctionne que les exécutants... L'impunité y est endémique ! Les défenseurs des droits de l'homme mirent en cause les forces de sécurité du président tchétchène pro-russe Ramzan Kadyrov, soutenu par le Kremlin, également montrées du doigt pour de nombreuses exactions commises dans la république, ainsi qu'après l'assassinat de la journaliste d'opposition Anna Politkovskaïa à Moscou en 2006.

Le président tchétchène Ramzan Kadyrov où l'ignoble rejoint le façadisme de l'État de droit ! Ramzan Kadyrov, accusé par l'ONG russe Memorial du meurtre de la militante des droits de l'homme Natalia Estemirova, porta plainte contre la mémoire de la militante « pour atteinte à l'honneur, à la dignité et à la réputation du président tchétchène », invoquant son honneur de « père de famille » et de « fils de président martyr ».

Natalia Estemirova
© 2007 Victoria Ivleva-Yorke - Creative Commons - Diffusion & modification autorisées

Ces autorités pro-russes construisent leur légitimité patriotique sur la lutte contre le Wahhabisme. Les guerres de Tchétchénie étaient des conflits certes indépendantistes, mais surtout religieux : l'Église chrétienne orthodoxe contre un islam qui se radicalisa. Dans ce contexte, Natalia Estemirova continuait à dénoncer les exactions sommaires en Tchétchénie, là où le Kremlin leva, en avril 2009, « l'opération antiterroriste » déclenchée en 1999, permettant ainsi le retrait des forces militaires déployées depuis.

Ramzan Kadyrov aura le cynisme de faire savoir que la perte de Natalia Estemirova était regrettable pour les droits des tchétchènes : la popularité Estemirova ne s'efface pas par le sang ! Les ONG sont nombreuses à remplir les missions d'un État défaillant. Mais les ONG soutenues par les autorités servent la reconstruction qui efface l'identité tchétchène, avec cette évidence qu'il faut bien continuer à vivre, puisque la question militaire semble dans l'impasse...

Femme d'expérience, prudente, Natalia Estemirova était, compte tenu de ses informateurs, la seule à tenir l'inventaire des crimes en Tchétchénie : plus personne ne le tiendrait aujourd'hui... Il semble acquis que Moscou et Grozny aient voulu effacer à jamais la mémoire des crimes contre l'humanité perpétrés en Tchétchénie ! En Russie, il est admis que celui qui s'applique à trop nuire à la mémoire de Staline, ne serait pas un bon patriote. Le despote ayant, aux yeux des autorités actuelles, eut pour mérite de mettre en respect le monde devant le génie russe.

La résignation, voilà ce que Natalia Estemirova combattit toute sa vie, résolue, avec abnégation ! Elle rejoint Anna Politkovskaïa dans le panthéon des femmes de libertés... Elle laissera pour l'Histoire cette mémoire, dignité d'un peuple tchétchène, toujours dominé par la puissance russe... Raison d'État qui ne sut pas se grandir avec la main tendue de la réconciliation !
      


Hommage Estemirova
envoyé par rsf_internet. - L'info internationale vidéo.
Rassemblement à Paris, le 17 juillet 2009, en hommage à la défenseur des droits de l'homme Natalia Estemirova, assassinée en Tchétchénie, le 15 juillet 2009

Voir aussi :
       Comité de Tchétchénie
      

ANNEXE
Le 3 septembre 2009, Moscou annonce qu'il y aura un nouveau procès Politkovskaïa... La communauté internationale se félicite de ce geste de bonne volonté du Kremlin en direction des droits de l'Homme, malgré le coutumier cynisme dont Poutine se fait fort, avec ironie, devant les russes, qui parfois osent sourire des caricatures très inspirées par Vladimir.

Selon le journal d'investigation « le canard enchaîné », le petit-fils de Staline a porté plainte contre Novaïa Gazeta pour avoir souillé la mémoire de son aïeul, souillé la nation russe...

ANNEXE
Le petit fils de Staline est débouté, le 13 octobre 2009, de sa plainte contre Novaïa Gazetta.

ANNEXE
Le Parlement européen a décerné, le jeudi 22 octobre 2009, le prix Sakharov 2009 à Memorial, l'ONG de Natasha Estemirova.


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