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2ème Chronique

Dictature financière : on le savait Davos !

Kritix, le Sunday 8 February 2004 - 6286 consultations - Commenter la chronique

Sous un soleil écrasant, la clôture du Forum social mondial (FSM) de Bombay (Inde), rassemblement des alter et anti-mondialistes, a coïncidé le 21 janvier dernier, avec l’ouverture sous la neige du 34ème forum économique mondial (FEM) de Davos (Suisse). Au 29 janvier 2004, chacun était assuré d'observer le traditionnel malentendu entre les Puissants et le Peuple. Mésentente chronique entre le Forum social mondial qui a quitté Porto Alegre pour tenir ses assises à Bombay, et la trente-quatrième édition du FEM de Davos. Les alter-mondialistes se sont réunis à Bombay, ville de l’Inde profonde, synonyme de misère et de détresse sociale, appartenant à un monde totalement différent de celui de l’autre Inde, celle de l’informatique et des technologies de pointe.

Le microcosme patronal mondial s’est donc réuni à Davos, la plus célèbre station suisse de sports d’hiver. D'un côté nous avons les insurgés et tous les excès de peuples en détresse, de l'autre nous avons les nantis qui ne songent qu'à chercher la croissance via les gains de productivité ! Davos compta tous ceux qui comptent de la finance mondiale: celle-ci étant friande du court terme et non du long terme... il a été discuté des modalités « d'approche entrepreneuriale » pour mieux user des « flux tendus » (politique industrielle avec absence de stocks)! L'intérêt des Puissants n'est désormais plus de satisfaire la Demande, mais plutôt d'optimiser l'Offre ! Autrement dit, pour Davos la croissance économique mondiale n'est profitable qu'à une portion congrue de l'Humanité. Marche ou crève ! Et encore, devriez vous marcher conformément à « l'esprit de Davos ». Désormais en 2004, le Capital, la richesse mondiale est mise aux coffres et il ne saurait être aucunement possible d'envisager une quelconque régulation ou répartition de ces mêmes richesses via la fiscalité, pour concourir en toute hypothèse à ce que l'on pourrait qualifier de « développement durable mondial »... De l'intérêt général, Davos n'en veut pas !

Ces deux évènements annuels eurent lieu au moment même où G.W.Bush prononçait son annuel discours sur « l’état de l’Union » dans lequel il défendit « becs et ongles » sa politique irakienne en répétant que son pays avait eu raison d’attaquer Saddam Hussein et qu’il ne demanderait pas d’autorisation pour entrer en guerre la prochaine fois. Les 100.000 participants au rassemblement de Bombay, qui avaient violemment dénoncé la politique du président US, ont réservé à ce discours un accueil glacial. Dans la station de ski des Grisons, la rencontre des “ Grands ” s’est déroulée sous haute surveillance: plusieurs centaines de policiers et près de 2.000 soldats protégèrent la place !

La situation “ apathique ” de l’économie mondiale a, de toute évidence, accaparé l’attention. Le problème de la relance des négociations sur la libéralisation du commerce mondial, conformément aux délais fixés (fin 2004 - cycle lancé à Doha en 2001 par l’OMC) a été l’objet d’une réunion informelle où l’on a tenté d’apaiser les tensions apparues sur le dossier agricole, à la dernière conférence de Cancun (Mexique), entre pays pauvres et pays riches qui avaient refusé de faire un pas décisif en vue de supprimer les subventions agricoles. Depuis cette date (2003), les négociations commerciales piétinent. Sur cette question de la suppression des subventions agricoles, point-clé des négociations, Kofi Annan a plaidé, dans son discours, en faveur de cette élimination et d’un rééquilibrage des échanges commerciaux entre le Nord et le Sud et exhorté les pays riches à la résolution de ce problème qui, dit-il, « met en danger le système commercial multilatéral » et empêche « un accord favorable aux pauvres ». Cherchant à replacer la pauvreté et le développement au centre des préoccupations du monde des affaires, le secrétaire général de l’O.N.U. a défendu les objectifs fixés par le « Sommet du Millenium » onusien en l'an 2000, à savoir la diminution de moitié de la pauvreté, de la faim et de la maladie d’ici 2015; et annoncé la tenue en juin 2004, à New-York, d’un Sommet mondial sur le développement en demandant aux représentants de la finance internationale de s’impliquer davantage dans le développement des pays les plus pauvres.

Quant au bilan de la situation économique mondiale, le tableau présenté par le représentant de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique ) portait principalement sur les perspectives de la croissance de la « zone UE » qui, du fait de la hausse de l’euro, peine devant le billet vert. Le niveau du dollar avantage les exportateurs US au détriment de leurs concurrents UE. D’autres experts présents, tout en demeurant optimistes quant à la reprise, ont mis en garde contre les effets négatifs et pernicieux de la persistance des déficits US et se sont montrés inquiets sur une rechute de l’économie US. Autre question au cœur des débats : la corruption, après les récents scandales qui ont frappé l’italien Parmalat, le suisse Adecco; la responsabilité sociale et éthique des dirigeants d'entreprise a figuré en bonne place, comme l'a noté le président de la Confédération hélvétique Joseph Deiss. Le patron de Nissan, Carlos Ghosn, (futur PDG de Renault) lui, minimise: "il y a de toute évidence des affaires graves, dramatiques, mais ne généralisons pas." Le ministre US de la Justice a estimé que “ la corruption détourne 2.300 milliards de dollars par an ”, l’équivalent du budget US, et dont le coût représente, selon la Banque mondiale, environ 7% de l’économie Mondiale annuelle. Sur ce thème s’est également penché un rassemblement d’ONG, critiques vis-à-vis du forum économique mondial, « Public Eye on Davos », en appelant les multinationales à rendre compte de leurs actes et le monde à une gestion « disciplinée et rigoureuse ». Kofi Annan n’a pas manqué, de son côté, de souligner que « les efforts du monde des affaires pour promouvoir la transparence et lutter contre la corruption peuvent être des mesures efficaces pour empêcher les conflits d’éclater ». Autant de questions qui se trouvent au cœur des préoccupations du monde, même si les participants ont été invités à laisser au vestiaire leur cravate (!) pour garder, selon les organisateurs, le côté informel de cette rencontre de Davos durant laquelle il a abondamment neigé… et où l’atmosphère était plutôt glaciale…

Cette année, l’agenda a été largement occupé par les défis de la reconstruction de l’Irak, le commerce mondial et la fracture entre l’UE et les USA. Lorsque plus de 2100 dirigeants politiques et économiques les plus puissants de la planète se réunissent ainsi, on serait pourtant en droit d'attendre des résultats concrets. Et là, le bilan est plus mitigé. Plus de 250 sessions et de nombreuses réunions de haut niveau ont alimenté les cinq jours de ce 34e sommet annuel du Forum économique mondial (WEF). Monsieur Deiss, maître de cérémonie, a également organisé un mini-sommet avec 19 ministres du Commerce et autres responsables du monde entier afin de relancer la ronde actuelle des négociations de l’OMC. Ces négociations sont dans l’impasse depuis l’année dernière, en raison des désaccords entre Américains et Européens sur les subventions agricoles. Les ministres ont profité de Davos pour appeler les 148 Etats membres de l’OMC à ne pas gaspiller les 12 prochains mois. Si cet appel est entendu, il sera à mettre au crédit des organisateurs du WEF. De même, ce 34e forum de Davos devait être une occasion de replâtrer les relations transatlantiques ternies par le conflit en Irak. Le vice-président US, Dick Cheney, a été dépêché à Davos pour y délivrer un message de conciliation.

Durant ce qui n’était que son deuxième voyage à l’étranger en trois ans, Dick Cheney a appelé l’Europe a collaborer avec les USA dans la lutte contre le terrorisme et dans la promotion de la démocratie au Proche-Orient. «Nous appelons nos amis et alliés du monde entier, et en particulier en Europe, à se joindre à notre effort», a notamment déclaré le numéro deux de la Maison Blanche. Certains observateurs ont vu dans ce discours une volonté nouvelle de la part de l’administration Bush d’engager le dialogue avec l’UE. Le document israélo-palestinien soutenu par la Suisse, connu sous le nom « d’Accord de Genève », a également occupé les débats. L’ancien président US Bill Clinton a notamment déclaré que ce texte exprime le désir de trouver une solution. De son côté, Javier Solana, chef de la diplomatie UE, a estimé qu’il y avait une «valeur pédagogique fondamentale» à rappeler aux deux parties l'ampleur des sacrifices à faire pour trouver un accord. Marwan Jamil Muasher, ministre jordanien des Affaires étrangères, a également apporté son soutien à l’accord, estimant qu’il résout «chaque point de détail» du conflit. La portée symbolique de la visite de Dick Cheney a été quelque peu amoindrie par la défection des Européens: les dirigeants britanniques, français et italiens ont en effet brillé par leur absence cette année à Davos, empêchant une réconciliation...

Le fondateur de Microsoft a profité du forum de Davos pour relancer un projet qu'il avait déjà exposé et pillé voici quelques mois : faire payer les courriels ! Pour lutter contre le spam (l'envoi non sollicité de millions de courriels publicitaires), l'entreprise « Goodmail Systems » propose de faire payer le courriel. Le coût proposé serait un cent (un centime de dollar). Quelqu'un qui enverrait un million de courriels a un centime l'unité devra ainsi payer 10000 euros. De quoi faire réfléchir plus d'un spammeur ! Le New York Times rapporte que l'idée a été reprise par Bill Gates à la Conférence de Davos et est discutée en ce moment entre Microsoft et Yahoo, deux des grands fournisseurs de services de courrier électronique. L'affranchissement électronique, une sorte de code numérique dans le titre du courrier, serait payé par l'auteur du courriel au FAI (fournisseur d'accès internet) qui distribue le courrier. Une des conséquences serait que l'accès à l'Internet deviendrait entièrement gratuit puisque les fournisseurs seraient payés par la distribution du courrier electronique aux abonnés. Par contre, un service comme les infolettres (newsletters) y compris celle de cette agence de presse, ne pourrait plus être gratuit: beaucoup disparaitraient. Les infolettres gratuites seraient ainsi limitées aux grosses entreprises et aux services de l’état. Certains ont proposé de limiter l'affranchissement aux spammeurs, mais comment faire le tri entre un courriel envoyé a un proche et celui d'un spammeur? C'est justement ce problème technique sans solution satisfaisante qui a amené « Goodmail Systems » a proposé cette solution radicale. Car ces derniers mois, on a vu la collusion de plus en plus nette entre spammeurs et hackers, ainsi que leur dérive mafieuse !

Après cinq jours de débats et de rencontres au sommet, le FEM a fermé ses portes à Davos. Mais c’est surtout l’absence remarquée de l’UE - en tant que force unie - qui a fait beaucoup couler d’encre. Ce qui, selon la « Tribune de Genève », a permis à une «Amérique triomphante», parce que «sans véritable contradicteurs», de n’avoir pas «dévié de sa ligne sur la guerre contre le terrorisme ou le commerce international». A Davos, il semble que la dictature financière fait bon ménage avec le Monde: le statut quo triomphe et des alter-mondialistes, et des cols blancs ! C’est pourtant contraire aux injonctions de Bill Clinton, qui en ouverture du WEF (world economic forum), édition baptisée « Ensemble pour la sécurité et la prospérité », avait supplié «presqu’à genoux les 2100 participants de cesser de bavarder et de passer à l’action». Un non-évènement en somme qui pourtant paraphe un ordre mondial sur le déclun... Tremblez ! ...devant la moyenne des augmentations réelles annuelles dépenses discrétionnaires nationales US (Source : Club for Growth, se basant sur des tableaux historiques du budget américain, 2004):
       Lyndon B. Johnson (1965-69) : 4,3%
       Richard Nixon (1970-75) : 6,8%
       Gerald Ford (1976-77 : 8,0%
       Jimmy Carter (1978-81) : 2,0%
       Ronald Reagan (1982-89) : 1,3%
       George H.W. Bush (1990-93) : 4,0%
       Bill Clinton (1994-2001) : 2,5%
       George W. Bush (2002-04) : 8,2%.G.W.Bush, républicain conservateur, augmente les dépenses plus de 300% plus rapidement que son prédécesseur, Bill Clinton, démocrate. Le capitalisme ne fonctionne pas. Le système du capitalisme est corrompu."Ces remarques ont été attribuées à Alan Greenspan, chef de la US banque fédérale... et rapportées par l'ancien secrétaire au Trésor US, Paul O'Neill. La « marchandisation du Monde », revient à omettre que l'économie est au service du Politique et non l'inverse... Trouvez le site officiel du Forum de Davos sur http://www.weforum.org. Les protagonistes du WEF ont bien été en mal, de conjurer ce qui les emporte et qu'ils alimentent: les scandales financiers, le chômage et l'échec de la lutte contre le terrorisme !
       Contrepoint critique au FEM, le "Public Eye on Davos", rassemblant les ONG, s'est penché sur le même thème: l'ancien haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'Homme, Mary Robinson, a appelé la communauté internationale à "travailler de manière disciplinée et rigoureuse" afin d'obliger les multinationales à rendre compte de leurs actes. Davos intronise en « petite pompe » la dictature financière; et sombre, le Monde sombre... pour quelle issue ?


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